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  • Photo du rédacteurThibaut

Mathieu* - "Je n'ai pas de talent mais je suis un gros bosseur"

Après 4 ans d'accompagnement (mon tout premier client), le chemin parcouru est impressionnante et inspirant pour beaucoup.

Merci à lui pour son partage en toute sincérité !


Bonne lecture


*NB : Le joueur a souhaité garder l'anonymat. Il s'appellera Mathieu



 

Mathieu, peux-tu te présenter ? Quel sport fais-tu ?


Je m’appelle Mathieu, je suis joueur de rugby professionnel en TOP 14.



Peux-tu nous expliquer pourquoi ce sport ?

Quels ont été tes objectifs de la saison ? Quels sont ceux pour les années à venir ? Et ce qu'ils représentent pour toi ?


Le rugby est arrivé un peu par hasard. En effet, j’ai commencé le rugby après le coupe du monde en 2007.


Je me suis senti tout de suite bien intégré. Y’avait le goûter du mercredi après les entrainements. C’était vraiment agréable de partager ce moment avec des mecs de mon âge juste après l’entrainement.


Étant professionnel, je cherche à jouer au plus haut niveau, et pourquoi porter un jour le maillot de l’équipe de France.

Gagner le bouclier de Brennus.


Mes objectifs à court terme :

Dans un 1er temps : rejouer au rugby.

Reprendre le rugby. En effet j’ai été opéré l’automne dernier à l’épaule et depuis je n’ai pas repris.


À moyen terme :

Retrouver mon meilleur niveau et faire une belle fin de saison avec mon club pour disputer les phases finales et peut-être plus.


À long terme :

Aller en équipe de France et pourquoi gagner ma place pour jouer la coupe du monde.

Ce sont de beaux objectifs qui font rêver. Mais ils ne sont pas inatteignables, au contraire, c’est motivant de se lever le matin en ayant tous ces objectifs en tête. Je ne travaille pas pour rien. Je sais ce que je veux aller chercher.





Quelles problématiques rencontrais-tu avant l’accompagnement en préparation mentale ? Quelles conséquences pouvaient-elles avoir ?


Avant de faire appel à la préparation mentale, je n’arrivais pas à gérer ma frustration et accepter parfois les échecs.

Je ne trouvais pas de solutions. J’avais le sentiment d’accumuler plus de problèmes sans savoir les gérer.


En tant qu’athlète, mes performances décroissaient, ce qui se traduisait par une perte de confiance en soi. C’était dur, donc je me mettais la pression pour faire de meilleurs matchs/entrainements. Mais dans ma tête tout se mélangeait, impossible d’arriver à être réfléchi et calme. J’appuyais en même temps sur l’accélérateur et le frein.


Tout ce côté négatif, je le retrouvais en dehors du cadre rugby. Sur le plan humain j’étais rongé de l’intérieur. Ce qui se traduisait par : ne pas avoir le moral, être triste parfois, ne pas savoir où aller ni comment faire. Un sentiment de solitude s’installait et intérieurement je me flinguais pour rien. Tout ça parce que je ne parvenais pas à trouver la clef qui me permettrait de sortir la tête du guidon.



Pourquoi avoir fait appel à la préparation mentale ? Quelles attentes en avais-tu ?


J’ai fait appel à la préparation mentale pour m’aider à fixer un cadre.


Quand j’ai commencé à jouer en pro, j’avais beaucoup de frustrations de ne pas assez jouer. Cette frustration m’amenait à faire n’importe quoi, à dégoupiller, à m’emporter, à devenir vite agressif.


J’avais l’impression que tout était injuste et peu importe ce que je faisais, ce n’était pas de ma faute. Selon moi, ils (les entraîneurs) ne comprenaient pas, je devais absolument jouer.

Or, je n’étais pas prêt. J’ai mis un peu de temps à l’accepter et à le comprendre.


Et une fois que j’ai eu ma chance, je voulais trop en faire. Sauf que j’étais partout et nulle part à la fois. Ce qui se traduisait par des contre-performances.


En me tournant vers la préparation mentale, j’ai amélioré ma gestion de cette frustration. J’abordais les matchs plus sereinement en me fixant des objectifs quantifiables. Ils me permettaient de suivre une ligne directrice pendant les rencontres, cela m’aidait beaucoup à rester plus concentré.


L’approche de la compétition fut différente et mes performances sont devenues meilleures. J’ai gagné ma place et j’ai obtenu bien plus de temps de jeu.


J’avais besoin de quelqu’un capable de m’écouter et de m’aider à réfléchir pour trouver des solutions, ainsi utiliser mon potentiel au maximum.

C’était important pour moi de vider mon sac en toute confiance, sans craindre un jugement quelconque. Le plus important pour moi, c’est l’écoute puis les échanges pour que j’arrive à faire le cheminement de réflexion par moi-même.

La préparation mentale m’aiguille, mais je dois être acteur de cette réflexion.


Peux-tu nous décrire comment s'organise et se déroule toute la préparation de la saison (physique, tactique, mental, ..) ?


Je vais décrire ma semaine en tant que blessé, c’est devenu mon quotidien depuis maintenant 4 mois.


Semaine type à peu près :

- Matin = cardio, muscu et réathlétisation avec les kinés

- Après-midi = soins/récup


En ce moment je me lève avec l’envie de rejouer au rugby.


Cette période est un peu maussade.

En effet, je suis assez seul, loin de l’équipe parce que je m’entraine de façon décalée par rapport à eux. Je suis entre les mains des prépas physiques et des kinés. Malgré cette période pas des plus agréables, j’aime bien cette solitude. Elle me permet de m’endurcir. Chaque séance faite, j’essaye de voir le progrès et l’évolution de ma blessure. Cependant, il est plus facile pour moi d’en prendre conscience lors des cardios.


C’est vraiment un moment où je me fixe des objectifs, et j’aime cet instant où je dois me dépasser pour arriver au bout de la séance. J’essaye de gratter quelques secondes pour parcourir une distance le plus vite possible. Et je me fais souvent un film dans ma tête en me motivant pour me dire que je peux gagner du temps, que je suis capable d’aller chercher ce petit plus qui me fera gagner.

Chaque fois j’essaye de m’améliorer un peu plus.


Ici préparation physique et mentale se complètent. Ma volonté est de progresser à chaque séance. 1% de mieux c’est un progrès et j’essaye d’aller chercher ce pourcentage supplémentaire.



Qu'as-tu appris sur toi durant la préparation et également durant la compétition ? Avec quoi souhaites-tu repartir de cet accompagnement ?


J’ai appris qu’on a en nous des ressources insoupçonnées.

En effet, hier il était parfois impossible de faire un exercice, le lendemain on y parvient.


Y’a une part de volonté et d’abnégation importante qui est assez facilement « activable » en moi. La préparation mentale m’a permis d’activer de façon plus aisée et fréquente ces deux facteurs.


Sur moi, j’ai appris que tout n’était pas un long fleuve tranquille, il faut toujours s’accrocher pour avancer. Je ne différencie pas trop le sportif de la personne parce que j’estime que la vie est comme un terrain de sport. On est face à plusieurs scénarios qu’il faut traiter et analyser pour prendre la meilleure décision.


Difficile de prendre de la hauteur sur sa personne et s’analyser. Une chose est sure ma blessure ne m’a pas rendu patient. J’ai parfois un peu baissé les bras, mais je suis vite retourner au travail.


En effet, tout n’a pas été linéaire pendant ma rééducation. Le plus dur a été d’accepter « de perdre du temps » pour me reposer et mieux travailler par la suite. Je veux toujours aller plus vite pour justement rattraper ce temps éloigné des terrains. Le plus important aujourd’hui est de pouvoir jouer au rugby à nouveau. Donc restez à l’écoute du staff médical. C’est sur ce point que je dois progresser. C’est vraiment très dur, la compétition me manque. Ne plus jouer au rugby est un grand vide en moi.


Par rapport à ma concurrence : les meilleurs jouent. À moi de tout faire pour être meilleur qu’eux. Pour cela il est important de prendre le bon de chacun pour tous ramer dans la même direction et se tirer vers le haut.


Les supporters sont la plupart bienveillants. Ils sont souvent là à me demander « quand est-ce que tu reviens ? » Je pense que cette question est la plus pénible. Mais elle part d’une bonne intention.

Moi ça me ronge de l’intérieur, j’attends tellement ce jour de retrouver le groupe, les entrainements et les matchs… Patience, patience….


Mon entourage voit tous les efforts que je fournis pour revenir, ils sont d’un soutien précieux.


Je souhaite repartir avec un mental prêt à encaisser tous les péripéties. Cette mauvaise passe va m’aider pour la suite de ma carrière. J’espère que des choses positives m’attendent dans le futur.


La préparation mentale va me permettre de consolider les bases que j’ai déjà, mais aussi d’aller chercher cette petite chose qui va faire de moi quelqu’un de plus fort et meilleur.


Qu’est ce que l’accompagnement en préparation mentale t’a apporté ?


L’accompagnement à la préparation mentale m’a permis de mieux me connaître. J’ai pu comprendre où étaient mes forces mais aussi mes faiblesses.



Sur qui as-tu pu t’appuyer tout au long de ton aventure et de quelle manière ?

Pendant ma convalescence, j’ai pu compter sur mes proches et mon préparateur mental. En effet, chaque personne m’apporté ce qu’elle pouvait.


Mais il est le vrai que le travail fournit lors des séances avec mon préparateur mental ont été plus que bénéfiques.


Il est important pour moi, comme je l’ai dit tout à l’heure, de vider mon sac. C’était important d’extérioriser les peines, les moments de doute, mais aussi les bons moments.

Tout n’a pas été négatif et dur.


Au cours de ma rééducation, je me suis pas mal appuyé sur moi. Par moment j’avais besoin de me recentrer sur moi-même, et je n’avais pas envie d’échanger avec les autres.

Il y’ a eu des moments difficiles, notamment après les matchs. D’un côté tes potes savourent leur victoire et toi tu es du tiens et tu assistes à la scène comme un étranger.

Tu rêves d’une chose c’est d’être à leur place.


Après mes proches m’ont apporté tout le côté détaché du rugby. Je ne suis pas issu d’une famille de rugbyman, donc les sujets ne tournaient pas qu’autour du ballon. Et c’était vraiment agréable.

Ce détachement était une bulle d’air.


Le message c’est tout simplement merci pour leur soutien. Je pense qu’ils ont vraiment partagé ma peine. Mais on va réussir ensemble à s’en sortir.



Si tu pouvais envoyer une lettre ou donner des conseils à toi-même, enfant, que souhaites-tu te dire ?


Cher Mathieu,


Accroche-toi, une carrière de rugbyman professionnel passe vite, profite de tous les instants. Et même dans ta vie, tu vas rencontrer des périodes pas toujours drôles. Ne perd jamais espoir, essaye d’être positif le plus possible et va de l’avant.


Comme disait la mère de Forrest GUMP, « la vie c’est comme une boîte de chocolats, on ne sait jamais sur quoi on va tomber ».

Et plus sérieusement, la vie est belle, le sport aussi, pense à t’écouter davantage va au bout des choses et n’hésite pas à te tourner vers les autres quand tu en as besoin.


Un jour, toi aussi tu tendras la main à quelqu’un.



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